INAUGURATION DE L'EXPOSITION NUMISMATIQUE
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Ed)
—- Jeudi, 26 mars 1970 =
Salle lo, vitrines 1 - lo
Depuis que la Numismatique a recu ses lettres de noblesse
comme science auxiliaire de l'Histoire, l'exposition de monnaies
retraçant l'évolution de la circulation monétaire dans une
région depuis l'antiquité, représente un attrait majeur pour le
visiteur d'un Musée d'Archéologie. Dans l'attente de l'aménage-
ment d'une salle d'exposition appropriée, nous nous étions
efforcés de combler cette lacune - au cours des années passées -
en exposant temporairement des monnaies et médailles anciennes
ot modernes.
La salle dont nous disposons ä present permet enfin de rendre
accessible au public nos "trésors" numismatiques, et ceci dans
des conditions de sécurité parfaite.
Les pieces exposées - plus de 1.300 monnaies, medailles et
distinctions honorifiques - ont fait l'objet d'un choix parmi
les quelque 35.000 unités que compte notre médaillier. Cette
proportion est de loin supérieure à celle qu'on constate dans
les expositions similaires à l'étranger.
Sur dix panneaux disposés dans neuf larges vitrines infran-
gibles, le visiteur pourra admirer des spécimens représentatifs
du numéraire ayant circulé sur notre territoire depuis l'époque
gauloise jusqu'aux temps modernes. Ce théme comporte en supplé-
ment un cheix de monnaies d'or et d'argent étrangères du moyen
âge et des temps modernes, une série de médailles luxembourgeoi-
Ses, et un ensemble précieux de distinctions honorifiques
luxembourgeeises et étrangéres. En outre, différents objets
particuliérement précieux bien que ne relevant pas directement
de la numismatique ont trouvé refuge dans cette salle, dans le
but de garantir leur sécurité. Relevons le fait que la plupart
des pièces antiques et médiévales proviennent du Grand-Duché, et
passons en revue les différentes vitrines:
Monnaies gauloises
Notre principal "fournisseur" en monnaies gauloises est
l'important oppidum gallo-romain du Tetelbierg. Plus de
2.000 piéces y ont déjà été découvertes; la majorité est
d'origine trévire; il semble certain qu'un atelier monétaire
existait sur ce site à l'époque gauloise. Certaines des
piéces exposées ont fait partie de la collection du gouver-
neur Th.-I. de la Fontaine. On remarquera la haute qualité
artistique que présentent certains spécimens qualifiables de
véritables petits chefs-d'oeuvre d'expression non-classique.
République romaine
Après la guerre des Gaules de Jules César - vers l'année Fo -
les monnaies de la République furent introduites en plus grand
nombre dans nos régions, où elles circulaient à cóté des
pieces gauloises. L'extróme variété de types qu'on encontre
notamment sur les deniers émis depuis l'an 119 justifie qu'on
les considère comme des documents historiques de premier
ordre. Les pièces exposées font partie de la collection du
gouverneur Th.-I. de la Fontaine, acquise par l'Etat en 1856.
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Empire romain
Une série iconographique assez complete des empereurs, impé-
ratrices et césars a taujours été d'un attrait particulier.
Les pièces exposées dans cette vitrine ont été choisies de
fagon à illustrer les différentes réformes monétaires dues
généralement à l'inflation lente, mais constante, à laquelle
est sujet le monnayage impérial au cours de cing siécles
d'existence. La circulation monétaire de cette époque nous
est fort bien connue grâce aux dizaines de milliers de
monnaies impériales découvertes au Luxembourg.
Tresors romains
L'étude minutieuse des trésors permet de mieux encore connaître
les différentes espèces entrant dans la composition de la
circulation monétaire à l'époque de la formation de tels
dépôts. Le trésor d'imitations locales du déclin du IIIe
siecle découvert au Tetelbierg nous oblige à conclure à
l'existence d'un atelier non-officiel sur ce site à l'époque
indiquée, Celui de Berdorf nous fait connaître des détails
précieux sur la fabrication de telles imitations dans une
officine située peut-être dans la caverne dite "Raiberhiel"
(près de Berdorf). Imitant des types romains et byzantins, le
sou d'er (solidus) et les tiers de sou d'or mérovingiens nous
confrontent avec un style de conception non-classique. Parmi
les antiques disposés dans cette vitrine on remarquera
notamment le fameux masque en bronze de Hellange et des
Spécimens représentatifs de la joaillerie romaine et méro-
vingienne.
Monnaies luxembourgeoises
La plupart des monnaies luxembourgeoises du moyen Âge et du
début des temps modernes sont réputées plutôt rares. À côté
de celle de Bruxelles, notre collection est la seule tant
soit peu complète, grâce à l'acquisition, en 1957, de la
fameuse collection C. de Muyser. Les pièces exposées permet-
tent de suivre l'évolution du monnayage luxembourgeois, depuis
l'époque du denier jusqu'aux émissions récentes. Les florins
d'or de Jean l'Aveugle et de "Charles IV" que - sous toute
réserve - Bernays et Vannérus attribuent à la série luxem-
bourgeoise, ont été éliminés. En réalité, les premiers sont
originaires de Bohême (atelier de Prague), et les seconds
n'ont rien à voir avec notre Charles IV, mais ils ont été
frappés par Charles-Robert d'Anjou, roi de Hongrie. Ces
piéces se trouvent réunies aveo d'autres piéces non-luxem-
bourgeoises (en haut, à droite), afin de mettre en garde le
collectionneur qui se verrait en offrir comme luxembourgeoises...
Trésors du moyen âge et des temps modernes
Une sélection de spécimens des principaux trésors conservés
au Cabinet des Médailles est destinée à informer le visiteur
sur les différentes espèces luxembourgeoises et étrangères
qui avaient pouvoir libératoire au pays. Les pièces les plus
d'enfouissement, date qui concorde généralement avec un évé-
Hu
nement guerrier connu par l'Histoire. Parmi les trésors trou-
vés dans notre pays, le plus important est celui découvert en
1472 dans une maison appartenant à Bernard de la Roche,
marchand à Luxembourg. Cette trouvaille ne comportait pas
moins de 1.078 pièces d'or enfouies lors de la prise de la
Ville par Philippe le Bon, la nuit du 22 novembre 1443.
Fiefs luxembourgeois
Seul Schônecken, St.Vith et - surtout - Cugnon sont représen-
tés dans notre médaillier. Les piéces si rares des autres
fiefs nous manquent completement.
Monnaies d'or médiévales
La majorité des pièces exposées - toutes de provenance incon-
nue - était admise à la circulation au Luxembourg. Elles sont
originaires notamment des Pays-Bas, d'Allemagne et de France,
Les florins allemands, émis pour 1a plupart par divers
archevéques de Tréves, de Cologne et de Mayence, sont les
mieux représentés.
Monnaies d'or et d'argent modernes
Les piéces exposées - émises principalement dans les pays
limitrophes - avaient en partie cours légal au Luxembourg. Le
petit almanach imprimé à Gand en 1546, contient les reproduc-
tions des diverces espéces d'or admises alors à la circulaticn
aux Pays-Bas. Tout comme au moyen âge, des balances précises
servaient à vérifier le poids des monnaies.
Medailles luxembourgeoises
Au nombre des medailles t6moignant de notre passé mouvementé
il y a lieu de relever celle d'argent qui conserve le souve-
nir de la dévastation du Luxembourg en 1602 par les troupes
des Etats Généraux, conséquence de l'interdiction par le comte
Pierre-Ernest de Mansfeld aux habitants du pays de payer des
contributions à ces "rebelles". L'orgueil du Roi Soleil est
documenté par les médailles frappées en commémoration de la
prise de Thionville (1643) et de Luxembourg (1684). La pièce
centrale, rendant hommage au général Patton, est l'oeuvre des
artistes luxembourgeois J.&N. Lefèvre.
lo
Distinctions honorifiques
L'ensemble des pièces exposées avait été décerné à Paul
Eyschen, Ministre d'Etat de 1888 à 1915. Il s'agit de décora-
tions de degré supérieur conférées par de nombreux pays
européens. Le bijou (ou insigne) se portait généralement en
écharpe, tandis que l'étoile (ou plaque) était fixée sur la
poitrine. On remarquera 1a préciosité du bijou en or émaillé
de l'ordre de l'Aigie Blanc de Russie et la finesse de
l'insigne de l'ordre de Frangois Joseph d'Autriche.
Au centre, une tabatiere en or sertie de tres nombreux
brillants et comportant au centre le portrait en médaillon
de Guillaume II, empereur d'Allemagne.
La visite aura sans doute fait apparaître tout l'intérêt
que les monnaies et médailles présentent pour le numismate aussi
bien que pour l'historien et l'amateur d'art.
Terminons en adressant nos chaleureux remerciements aux
généreux donateurs qui - par leurs gestes désintéressés - ont
contribué à rehausser l'éclat de l'exposition.
WR